13 - 20 août. « Keep it real bro (and sista) » in NorCal

Publié le par pong.over-blog.org

« Arcata, la ville magique » saison 5 ou 6. Pendant les trois premiers jours sur place, en plus d’être hébergés gracieusement par un parfait inconnu et de profiter du spa finlandais dans le jardin de l’adorable café Mokka, Michiel se fait offrir une bonne bouteille de bière (pas de la Coors, hein) par un type qui ne peut pas emporter son pack dans le bar où il va. Peut-être une minute plus tôt, il déclarait qu’une bière était tout ce qui lui fallait. Deux cents mètres plus loin, je me penche pour ramasser un billet perdu sur un passage piéton. Personne aux alentours. Je déplie le billet, tiens donc il y en avait deux. 30$ qui allaient s’envoler, ç’aurait été bien dommage.

 

On est resté une bonne semaine au total, histoire de se reposer un peu et de ne rien faire en vitesse, pour une fois. Il y a eu une exception cependant avec une journée-stop pour aller voir les Redwoods, séquoias géants rescapés des tronçonneuses. Le comté d’Humboldt fut un temps le point de rassemblement des hippies/ecowarriors/militants qui vivaient dans les arbres un mois, 6 mois, deux ans… pour empêcher qu’ils ne soient abattus. La pratique existe encore mais je ne crois pas que la police continue à déloger les squatteurs ou résistants pacifiques enchaînés aux bulldozer en leur vidant une bombe lacrymogène dans les yeux. Quoique...

 

Une après-midi dans la forêt communale d’Arcata nous donne déjà un petit aperçu, même si la balade vaut autant le coup pour les arbres que pour les rencontres étranges qu’on y fait. Trois fois dans l’après-midi, un énergumène en vadrouille nous croise à des endroits différents. La première fois, grand sourire, regard insistant et silence pas embarrassant. La deuxième, petite conversation conclue par un très enthousiaste « HAVE FUN ! », les deux pouces tendus et toutes dents dehors. Encore un sourire pour l’ultime rencontre, mais cette fois notre homme est sûrement trop occupé dans sa tête pour taper la discute. Pour quelque raison, l’endroit attire beaucoup de psychonauts et de nombreux voyageurs de passage y campent avec leurs chiens et banjos. Tiens, c'est la saison des amours pour les limaces-banane.

 

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Question forêt, on nous conseille d’aller voir les alentours d’Orick, à une soixantaine de kilomètres au Nord. C’est l’un des rares endroits facilement accessibles où l’on peut encore trouver des parcelles « d’Old Growth », à savoir de forêt qui n’a jamais été coupée.

 

D’après mes souvenirs, rien de plus facile que de faire du stop devant la rampe d’autoroute à Arcata. Dans mes souvenirs j’étais aussi toute seule. Plus si facile à deux ! Quand enfin une femme s’arrête, elle prévient d’emblée Michiel qu’elle s’est arrêtée à cause de moi. Et qu’elle ne nous emmènera pas loin de toute façon. Elle ajoute aussitôt qu’elle en marre des autostoppeurs qui tendent un joint pour se faire prendre, bon point pour nous. Dans le même genre, on a vu un type en ville se balader avec un signe « Need weed for research » à côté d’un feu rouge et se faire remettre de quoi « étudier » par un conducteur dans la minute suivante. Un autre avait un panneau « Budz 4 Hugs ! » et arpentait la Plaza sous le nez des flics qui ont d’autres chats à fouetter.

 

Ne nous égarons pas vers un sujet aussi vital que polémique pour Humboldt County revenons-en à la voiture. Après nous avoir répété au moins 10 fois qu’elle ne prenait personne à bord et qu’elle n’allait pas plus loin que MacKinleyville, notre instit’-chauffeuse se lance dans un détour scénique et commence à nous raconter l’histoire de l’ancienne autoroute qui passe le long des falaises entre les plages de Moonstone et Westhaven. Elle roule un bon quart d’heure de plus que prévu et nous dépose finalement à Trinidad, où on aura la chance d’embarquer pour un trajet direct jusqu’au parking de l’un des sentiers qui traverse les vieux Redwoods près d’Orick.

 

Parking plutôt animé, puisque le Lady Bird Johnsonn Trail est une petite boucle accessible aux fauteuils roulants et semble très populaire. Mouais. Le gars qui nous a emmenés jusque-là jette un coup d’œil aux 100 premiers mètres et nous dit qu’il a vu bien mieux, avant de repartir. Au moins on n’aura pas de difficultés pour repartir et rejoindre la 101 avec tant de monde…Allez, une photo du parking mais juste pour l'échelle.

 

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Les Redwoods de cette région sont plus fins que leurs cousins situés plus au Sud et en profondeur dans les terres, mais bien plus hauts. « Fins », c’est-à-dire qu’on ne peut en encercler la base qu’avec une bonne dizaine de personnes, peut-être 12 pour les plus gros. C’est vraiment beau mais pas si spectaculaire quand on se retrouve coincés entre un groupe de touristes chinois et des familles à chaque coin de sentier. Question communion avec la nature, on repassera. Ou alors on prend cet autre sentier qui bifurque et rejoint l’autre côté de la montagne. Personne ne s’y engage étant donné que le chemin descend sur plusieurs kilomètres. Qui aurait envie de remonter ensuite pour retourner au parking ? Pour une fois on est bien contents de ne pas avoir de voiture, allez hop, c’est parti !

 

En à peine 5 minutes on se retrouve sur un sentier plus étroit, cernés d’arbres bien plus imposants et nombreux que de l’autre côté. Tout est redevenu silencieux dans la brume flottante, un peu trop même quand on sait que la région est peuplée de cougars et que les fourbes attaquent toujours par derrière. En descente et avec autant de cachettes potentielles, ça nous rendrait presque nerveux. A certains endroits, l’humidité ruisselle sur les fougères géantes et les branches recouvertes de mousse. Plic, ploc, deux heures de descente seuls avec les arbres et entre les centaines d’empreintes de cerfs (elks en anglais, plus grands que des cerfs mais improprement traduits « élans »). Le paysage change progressivement à mesure que l’on perd en altitude et qu’on se rapproche de la 101. Les arbres rapetissent et laissent plus de lumière filtrer. Le contraste du retour directement sur la route est rude ! Cherchez la petite tête en bas à droite sur la 2ème photo.

 

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C’était VRAIMENT bien, diantre. On n’apprendra que 10 jours plus tard qu’un couple de retraité a été dévoré par un cougar sur ce même sentier deux ans plus tôt.

 

La veille du jour fixé pour reprendre la route, j’arrive enfin à mettre la main sur l’insaisissable et adorable Jessy, la petite jeunette que j’avais rencontrée à Earthdance en 2010 et qui m’avait ramenée à Arcata. Toujours en mouvement et difficile à joindre, elle a habité à peu près partout depuis qu’elle a décidé de rejoindre Humboldt, y compris dans sa voiture. Cette fois-ci, elle est enfin installée pour de bon dans une grande maison *propre* avec son copain Max et deux colocs *normaux*. Elle nous propose directement de venir passer la nuit dans la chambre supplémentaire et étend l’invitation pour une journée de plus. Jessy reprend la fac lundi matin et veut absolument nous emmener à la rivière pour profiter du dernier weekend avant la rentrée. Une offre qui ne se refuse pas !

 

Il y a juste un petit bémol pour Michiel, pas vraiment fan de chiens après une vilaine rencontre avec un sale cabot errant au Tibet. Je l’avais prévenu que Jessy = gros pitbulls baveux... Max ouvre la porte et deux monstres se jettent sur nous pour dire bonjour. En premier, Kayus, pas encore un an, toujours prêt à chercher la bagarre avec n’importe quel autre chien. Pas méchant mais le genre excité qui renverse tout sur son passage. A vue de nez, 35kg de muscle. Brun clair, grandes oreilles triangulaires, une tête de coyote croisé avec un gros doberman et un american staffordshire. La deuxième bête ne nomme Gangitara et fait la taille d’un poney pour plus de 60kg. Elle est toute gentille et pataude même si personne n’aurait envie d’entrer dans la maison sans y être invité. Disons Mastiff, am staff et dogue allemand. Gangi bave beaucoup, boulote un saladier de croquettes matin et soir et va demander des caresses à Michiel toutes les 5 minutes quand elle ne mâchonne pas un objet non identifié.

 

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Elle nage aussi comme un poisson le lendemain dans la Mad River. Et comme elle adore jouer elle n’hésite pas à poser ses énormes pattes palmées sur son dos en laissant des grosses griffures et en le faisant couler. Le pauuuvre, hahaha.

 

La rivière, c’était VRAIMENT bien aussi. On n’aurait jamais pu y accéder seuls vu que leur coin « secret » à baignade se situe dans les montagnes qui surplombent la baie d’Arcata, à 40 minutes de piste après avoir quitté la route. Comme on est en Amérique et qu’on ne fait pas les choses à moitié, on y a va avec les deux pick-ups tout terrain (Dodge Ram 2500 bien sûr), 3 chiens, 7 personnes, 6 hula-hoops. J’ai oublié mon appareil photo, c’est peut-être mieux quand on sait qu’il fallait traverser la rivière à pied deux fois et que le sac a bien sûr pris l’eau. Ah oui, il fallait aussi descendre sur la berge en tenant une corde et avec la grosse Gangi dans les pattes. On s’est bien amusé en somme. Là encore, le retour fut étrange. Première étape : la piste au sommet des montagnes, la lumière dorée de fin de journée encore intense sur les longues herbes sèches et les rocs. En contrebas, une grosse nappe de brume toute cotonneuse. Deuxième étape : la forêt toute sombre et ses gros Douglas firs et redwoods, toujours en descente. De temps en temps, on croise un gros pick-up qui roule à tombeau ouvert pour rejoindre l’une des nombreuses propriétés privées (donc fermes) du coin. Petit signe de la main entre collègues. Troisième étape : plongeon dans la vallée et son épais brouillard, 10° de perdus et l’impression de sortir d’un rêve.

 

Voilà qui valait le coup de passer une journée de plus à Arcata. Le temps de prendre le petit déjeuner (américain je vous dis !) lundi midi avec Jessy à la sortie de cours, il est déjà tard quand on se poste à la sortie de la ville pour reprendre la route vers le sud. Objectif : la petite ville côtière de Mendocino.

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